Lafleur est courte, mais la joie qu'elle a donnĂ©e une minute n'est pas de ces choses qui ont commencement ou fin. Paul Claudel, L'Annonce faite Ă Marie, p.92. 3 C'est tellement triste d'ĂȘtre joyeux dans un monde oĂč le bien-ĂȘtre est un devoir. Serge Bouchard, Ătre en forme, p.164, De nouveaux lieux communs. 1
l'essentiel Alors que les tests ADN ont la cote en France, pour certains c'est toute une vie qui peut se jouer Ă l'obtention des rĂ©sultats. Des rĂ©ponses qui ont fait la lumiĂšre sur leurs origines, AurĂ©lie, Alexandre et GĂ©rard en ont obtenu. Pour la DĂ©pĂȘche du Midi, ils racontent comment ils ont raccordĂ© les fils de leur vie. "C'est incroyable", confie AurĂ©lie. Il y a deux mois, cette mĂšre de famille toulousaine de 31 ans a reçu les rĂ©sultats de son test ADN. Depuis, sa vie a pris un tournant inattendu. "On part de rien et on se retrouve avec une famille paternelle de onze frĂšres et sĆurs", s'Ă©tonne toujours la jeune maman. Cette famille, AurĂ©lie l'a retrouvĂ©e un peu par hasard, elle qui n'en a jamais eu et a Ă©tĂ© "placĂ©e Ă la DDASS" Ă l'Ăąge de six ans. Un jour, alors que son fils de six ans rentre de l'Ă©cole, il lui demande quelles sont ses origines. "Mon fils est typĂ© comme moi, peau mate, yeux marron. J'en ai beaucoup souffert Ă l'Ă©cole et quand il m'a questionnĂ© Ă son tour sur sa couleur de peau, j'ai dĂ©cidĂ© de faire un test." A lire aussi ENTRETIEN. Tests ADN "Je ne suis pas certaine que les gens qui y recourent aient conscience du danger", estime une gĂ©nĂ©alogiste Quelques jours plus tard, le verdict tombe. "Mes origines ethniques affichaient 60% de sang italien", explique AurĂ©lie. Mais, surprise, en plus de ces informations, la jeune femme obtient une correspondance de 6% avec un autre utilisateur du test. "Je ne m'y attendais pas du tout. AprĂšs avoir eu accĂšs Ă son nom, prĂ©nom et sa photo sur le site que j'ai utilisĂ©, j'ai rĂ©ussi Ă contacter cette personne sur les rĂ©seaux sociaux. C'Ă©tait le neveu de mon pĂšre biologique." Sous le choc, AurĂ©lie reçoit quelques photos de son pĂšre enfant. "La ressemblance Ă©tait dingue, j'ai reconnu mon pĂšre tout de suite, on aurait dit mon fils !" AurĂ©lie est maintenant en contact avec sa famille paternelle, son pĂšre biologique ne s'est quant Ă lui pas encore manifestĂ© mais la jeune femme "n'attend rien" de lui. "Pour moi la boucle est bouclĂ©e, j'ai des rĂ©ponses sur mes origines et c'est ça l'important." Mouton noir De son cĂŽtĂ©, GĂ©rard, retraitĂ© de 66 ans, a mis fin Ă des annĂ©es de qu'en-dira-t-on. "Depuis ma tendre enfance, il y avait des on-dit, des rumeurs", explique-t-il. Il faut dire que son histoire n'est pas commune. "Dans les annĂ©es 60, c'Ă©tait rare de voir une femme vivre avec deux hommes, surtout dans un petit village du MĂ©doc", confie l'ancien imprimeur. Une vie dont l'enfant qu'il Ă©tait n'a pas souffert. "Je ne me rendais pas compte de ce qu'il se passait, j'ai toujours Ă©tĂ© protĂ©gĂ©", raconte-t-il. Toutefois au dĂ©cĂšs de ses "deux papas", le tonnerre gronde dans la famille. "Mon frĂšre me jalousait parce que j'avais Ă©tĂ© trĂšs gĂątĂ© par le second compagnon de ma mĂšre et les rumeurs allaient bon train." Pendant des annĂ©es, GĂ©rard entend qu'il doit sĂ»rement ĂȘtre le fils de cet homme, et non pas du mari de sa mĂšre. "J'avais besoin de savoir lequel de ces deux hommes Ă©tait vraiment mon pĂšre", explique le retraitĂ©. Finalement, aprĂšs un test de paternitĂ© effectuĂ© avec l'une de ses sĆurs plus ĂągĂ©es, GĂ©rard dĂ©couvre que le mari de sa mĂšre est bien son pĂšre biologique. "Quand j'ai reçu les rĂ©sultats, j'Ă©tais surpris. Je les aimais tous les deux mais mon pĂšre biologique Ă©tait moins proche de moi. Au moins, cela a permis de clarifier la situation. Dans la famille, on ne parle plus trop de tout ça." "Je voulais savoir qui Ă©tait cet homme" Pour Alexandre, l'histoire est toute autre. En 2020, alors qu'il avait le nez plongĂ© dans les cartons de documents de ses parents dĂ©cĂ©dĂ©s, le jeune homme a fait une dĂ©couverte surprenante. "Je suis tombĂ© sur un dossier mĂ©dical qui prouvait ma conception par don de sperme", raconte-t-il. Face aux papiers gynĂ©cologiques et aux spermogrammes Ă©loquents, Alexandre dĂ©cide immĂ©diatement d'entamer des recherches. "Je voulais savoir qui Ă©tait cet homme", explique-t-il. AprĂšs avoir effectuĂ© trois tests diffĂ©rents, le jeune homme recolle les morceaux de l'identitĂ© d'un gĂ©niteur aux origines bretonnes et le contacte. Ă l'autre bout du fil, Jacques, 72 ans au moment des faits, reconnaĂźt avoir donnĂ© son sperme entre 1984 et 1986. "AprĂšs avoir fait un test ADN, nous avons dĂ©couvert qu'il Ă©tait bien mon gĂ©niteur." Au mĂȘme moment, lorsqu'il entreprend les analyses, Jacques dĂ©couvre Ă son tour qu'il n'a pas le pĂšre biologique qu'il croyait. "On a eu une histoire miroir en dĂ©couvrant que Jacques Ă©tait le fruit d'un adultĂšre." Depuis, mĂȘme si la nouvelle a Ă©tĂ© difficile Ă digĂ©rer, les deux hommes sont rĂ©guliĂšrement en contact. Alexandre est devenu prĂ©sident de l'association PMAnonyme qui milite pour "que les personnes issues de don de sperme puissent avoir accĂšs Ă l'identitĂ© de leur gĂ©niteur."La vie est bien trop courte pour perdre son temps Ă se faire une place lĂ oĂč lâon en a pas, pour dĂ©montrer quâon a ses chances quand on porte tout en soi, pour sâencombrer de doutes quand la confiance est lĂ , pour prouver un amour Ă qui nâouvre pas les bras, pour performer aux jeux de pouvoir quand on nâa pas le gout à ça, pour sâadapter Ă ce qui nâĂ©panouit pas. La vie est bien trop courte pour la perdre Ă paraĂźtre, sâeffacer, se plier, dĂ©passer, trop forcer. Quand il nous suffit dâĂȘtre, et de lĂącher tout combat que lâon ne mĂšne bien souvent quâavec soi, pour enfin faire la paix, ĂȘtre en paix. Et vivre. En faisant ce quâon aime, auprĂšs de qui nous aime, dans un endroit quâon aime, en Ă©tant qui nous sommes, Vraiment. » De Alexandre Jollien, philosophe et Ă©crivain suisse. Source Collectif atypique
BrowseRecommendations; Choice Awards; Genres; Giveaways; New Releases; GenresRemarquable... "La vie est bien trop courte pour perdre son temps Ă se faire une place lĂ oĂč lâon en a pas, pour dĂ©montrer quâon a ses chances quand on porte tout en soi, pour sâencombrer de doutes quand la confiance est lĂ , pour prouver un amour Ă qui nâouvre pas les bras, pour performer aux jeux de pouvoir quand on nâa pas le gout à ça, pour sâadapter Ă ce qui nâĂ©panouit vie est bien trop courte pour la perdre Ă paraĂźtre, sâeffacer, se plier, dĂ©passer, trop il nous suffit dâĂȘtre, et de lĂącher tout combat que lâon ne mĂšne bien souvent quâavec soi, pour enfin faire la paix, ĂȘtre en vivre. En faisant ce quâon aime, auprĂšs de qui nous aime, dans un endroit quâon aime, en Ă©tant qui nous sommes, Vraiment."Alexandre Jollien - "philosophe et Ă©crivain suisse"_________________Que chacun rĂ©tablisse la cohĂ©sion avec son propre CĆur, cela seul suffit...Car en ce CĆur se trouve le Dieu suprĂȘme, crĂ©ateur de l' sur la quĂȘte spirituelle, lien ci-dessous
146Vues 0 Votes par Anonyme dans Aime, Bien, Gens, Trop, Vie, â Citations â La vie est trop courte pour se rĂ©veiller avec des regrets «La vie est trop courte pour se rĂ©veiller avec des regrets, alors aime les gens qui te traitent bien et oublie les autres» Jolies pensĂ©es dâAlexandre Jollien Grandir, ce nâest pas sâenrichir de quelque chose de nouveau, câest dĂ©couvrir ce quâon a dĂ©jĂ lâintĂ©rieur. La libertĂ© intĂ©rieure, câest quand le regard de lâautre ne vous dĂ©termine pas. Ce qui accroĂźt la souffrance, et crĂ©e le manque, câest la comparaison. Ce qui nous sauve, câest de savoir que lâon ne peut pas guĂ©rir de ses blessures, mais que lâon peut vivre avec, que lâon peut cohabiter avec elles sans quâil y ait nĂ©cessairement de lâamertume.+ et lue rĂ©cemment La vie est bien trop courte pour perdre son temps Ă se faire une place lĂ oĂč lâon en a pas, pour dĂ©montrer quâon a ses chances quand on porte tout en soi, pour sâencombrer de doutes quand la confiance est lĂ , pour prouver un amour Ă qui nâouvre pas les bras, pour performer aux jeux de pouvoir quand on nâa pas le gout à ça, pour sâadapter Ă ce qui nâĂ©panouit pas. La vie est bien trop courte pour la perdre Ă paraĂźtre, sâeffacer, se plier, dĂ©passer, trop il nous suffit dâĂȘtre, et de lĂącher tout combat que lâon ne mĂšne bien souvent quâavec soi, pour enfin faire la paix, ĂȘtre en paix. Et vivre. En faisant ce quâon aime, auprĂšs de qui nous aime, dans un endroit quâon aime, en Ă©tant qui nous sommes, vraiment. Cet abandon, ce lĂącher prise me font penser Ă ce que je souhaite mettre en Ćuvre dans ma vie pour moi et pour ceux que jâaccompagne, dans ma vie privĂ©e et professionnelle coaching, mĂ©diation et magnĂ©tisme.Je cite ici Ă nouveau cette phrase qui me porte dan mon travail de coaching, de mĂ©diation et dâĂ©nergĂ©tisme Ătre adulte, câest savoir se donner enfin ce dont on a la sensation dâavoir manquĂ©.Cebien-ĂȘtre sera de courte durĂ©e car je n'aurai pas d'outils Et je reprends ici l'idĂ©e du philosophe Alexandre Jollien pour qui "la vie doit ĂȘtre un combat joyeux" ( Le mĂ©tier d'homme - Ed. Seuil ). Pour y parvenir, se dire " je veux aller bien " ne suffit pas. Les personnes en grande souffrance ont souvent besoin d'aide pour parvenir Ă formuler cette intention. CeJe reproduis ici un cours que jâai prĂ©parĂ© il y a quelques annĂ©es sur la question du handicap et de la diffĂ©rence, Ă partir de la lecture de LâĂ©loge de la faiblesse, premier ouvrage dâAlexandre Jollien, philosophe suisse qui puise dans la philosophie antique une inspiration continue. Il est un exemple vivant de la pertinence de la philosophique antique, et de son utilitĂ© pour affronter les Ă©preuves, en particulier celle du handicap. Ce cours a Ă©tĂ© conçu pour des Ă©lĂšves en Ă©cole de culture gĂ©nĂ©rale et de commerce, et notamment pour des Ă©lĂšves ayant choisi lâoption socio-Ă©ducative, câest-Ă -dire des Ă©lĂšves de 16-18 ans qui ont travaillĂ© et qui travailleront probablement par la suite dans le domaine social, avec des enfants, des adolescents en difficultĂ©, des handicapĂ©s ou encore des personnes ĂągĂ©es. Dans ce contexte, lâobjectif de ce cours est de prendre conscience de la notion de diffĂ©rence, et de rĂ©flĂ©chir Ă diffĂ©rentes attitudes morales Ă lâĂ©gard de la diffĂ©rence et du handicap. Lâobjectif est Ă©galement de dĂ©velopper lâempathie et le respect de lâautre. Le cours est basĂ© sur la lecture de lâEloge de la faiblesse, ouvrage Ă©crit par Alexandre Jollien en 1999. Pour mieux comprendre sa pensĂ©e, je me rĂ©fĂšre Ă©galement aux diffĂ©rentes chroniques quâil a Ă©crites dans diffĂ©rentes revues, et qui sont disponibles sur son site internet. Il existe Ă©galement, disponibles sur internet, quelques Ă©missions de tĂ©lĂ©vision dans lesquelles on voit Alexandre Jollien sâexprimer plus ou moins longuement par exemple Les grands entretiens » de la RTS. Finalement, en Ă©cho au discours dâAlexandre Jollien, la lecture de Vivre Ă corps perdu, de Robert Murphy, est trĂšs intĂ©ressante, et rejoint en de nombreux points les rĂ©flexions dâAlexandre Jollien. Qui est Alexandre Jollien? Ecrivain et philosophe suisse, handicapĂ© de naissance, il a vĂ©cu 17 ans dans une institution pour personnes infirmes moteur cĂ©rĂ©bral. Dans son ouvrage, Ă travers un dialogue fictif avec le personnage de Socrate, il raconte et analyse les annĂ©es passĂ©es dans cette institution, ainsi que son combat pour Ă©chapper au destin qui lui Ă©tait promis, le destin dâun rouleur de cigares. DĂšs les premiĂšres pages, il revient sur sa naissance et son handicap, dĂ©crivant, selon ses propres mots, lâĂ©trange crĂ©ature que je suis » Eloge de la faiblesse, Marabout, 2011, p. 23. Voici les termes quâil utilise pour se dĂ©crire O bon Socrate, jâĂ©tais tellement diffĂ©rent des autres je ne marchais pas du tout. Je mâexprimais bizarrement. La prĂ©cision de mes mouvements laissait Ă dĂ©sirer. Somme toute, je nâĂ©tais vraiment pas normal » A. Jollien, Eloge de la faiblesse, p. 23. DiffĂ©rent, bizarre, Ă©trange, voilĂ comment Alexandre Jollien se dĂ©crit lui-mĂȘme. Mais il utilise Ă©galement un terme sur lequel Socrate aimerait sâattarder il dit nâĂȘtre vraiment pas normal ». Il ne marche pas normalement, il ne parle pas normalement, il ne bouge pas normalement, etc. Mais quâest-ce que cela veut dire, normalement »? Quâest-ce que la normalitĂ©? Quâest-ce que cela signifie ĂȘtre normal »? Quâest-ce que la normalitĂ©? A lâaide de quelques images, et dâune courte vidĂ©o, jâaimerais rĂ©flĂ©chir dans un premier temps sur la notion de normalitĂ©. Peut-on dĂ©finir la normalitĂ©? Comment dĂ©finir la norme? A la demande de Socrate, Alexandre Jollien dĂ©finit ainsi ce qui est normal qui est conforme Ă la majoritĂ© ou Ă la moyenne des cas ou des usages; ce qui est habituel, familier » Eloge de la faiblesse, p. 25. Alexandre Jollien dĂ©finit ainsi la norme ou ce qui est normal comme ce qui correspond Ă la moyenne, Ă ce que la majoritĂ© des gens font ou Ă ce que la majoritĂ© des gens sont. Par exemple, il est normal de marcher ou de parler lorsquâon est un ĂȘtre humain, car la majoritĂ© des ĂȘtres humains marchent et parlent. Certes, il y a des exceptions, mais câest la norme, et en ce sens, les handicapĂ©s physiques, qui ne peuvent pas marcher ou ne marchent pas correctement comme Alexandre Jollien, qui ne peuvent pas parler ou ne parlent pas correctement comme Alexandre Jollien, ces handicapĂ©s ne sont pas normaux. Une personne est anormale dĂšs lors quâelle diffĂšre de la moyenne, dĂšs lors quâelle sâĂ©loigne, plus ou moins, de ce que la majoritĂ© des gens sont ou font. On remarque dans cette dĂ©finition la relativitĂ© de la normalitĂ© ou anormalitĂ©. On est normal ou anormal par rapport Ă la majoritĂ© ou la moyenne, câest-Ă -dire par rapport aux autres. Soit on leur ressemble, et dans ce cas on est considĂ©rĂ© comme normal, soit on est diffĂ©rent, et dans ce cas on est considĂ©rĂ© comme anormal. Ce qui dĂ©termine ma normalitĂ© ou mon anormalitĂ©, câest la diffĂ©rence par rapport aux autres. Si la diffĂ©rence est trop grande, je suis considĂ©rĂ© comme anormal. Normal qui est conforme Ă la majoritĂ© ou Ă la moyenne des cas ou des usages; ce qui est habituel, familier » Eloge de la faiblesse, p. 25. Mais si lâon sâintĂ©resse maintenant Ă ces deux enfants, dont la couleur de peau est diffĂ©rente. Lequel des deux enfants est-il normal? Quelle est la norme, dans ce cas? A quels autres » va-t-on pouvoir se rĂ©fĂ©rer pour juger si ces enfants sont normaux? A la fin de lâEloge de la faiblesse, Alexandre Jollien revient sur sa premiĂšre dĂ©finition de la normalitĂ© pour la complĂ©ter. En effet, on ne peut pas dĂ©finir ce qui est normal ou non de maniĂšre absolue, sans tenir compte du contexte dans lequel vit lâindividu . Ainsi, en ce qui concerne la couleur de peau, le garçon de gauche sera considĂ©rĂ© comme normal, câest-Ă -dire proche de la majoritĂ© ou de la moyenne, dans tel ou tel pays europĂ©en. Par contre, câest le garçon de droite qui sera considĂ©rĂ© comme normal dans telle ou telle rĂ©gion du continent africain, par exemple. Il est donc difficile de dĂ©finir lâanormalitĂ© exclusivement par rapport Ă la conformitĂ© aux rĂšgles dâune et une seule sociĂ©tĂ©, car celles-ci peuvent varier » Eloge de la faiblesse, p. 94. Comme le montre lâimage ci-dessus, la normalitĂ© est relative. Plus prĂ©cisĂ©ment, elle est relative au contexte dans lequel nous vivons. Ce qui est normal dans un pays ou dans une culture est tout Ă fait anormal dans un autre pays ou une autre culture Il est donc difficile de dĂ©finir lâanormalitĂ© exclusivement par rapport Ă la conformitĂ© aux rĂšgles dâune et une seule sociĂ©tĂ©, car celles-ci peuvent varier » Eloge de la faiblesse, p. 94. Câest la relativitĂ© de ce que lâon considĂšre comme normal » ou anormal » que cette image et la vidĂ©o que je vais vous montrer maintenant veulent mettre en avant. Cette vidĂ©o intitulĂ©e Et si ta normalitĂ© Ă©tait un handicap » met en scĂšne une personne considĂ©rĂ©e comme normale », câest-Ă -dire sans handicap particulier, et qui, placĂ©e dans un contexte oĂč la majoritĂ© des personnes sont handicapĂ©es, se retrouve elle-mĂȘme en situation de handicap. Sa normalitĂ© » devient un handicap dans un environnement oĂč tout est prĂ©vu pour des personnes handicapĂ©es. Câest-Ă -dire que dans ce contexte, les handicapĂ©s sont les personnes normales », et la personne non-handicapĂ©e est anormale ». Pour conclure sur cette notion de normalitĂ© et de norme, on voit donc que la norme est variable, car elle est relative au contexte dans lequel on se situe. En effet, on nâest anormal que par rapport Ă une norme. Or, cette norme change, varie, dâune sociĂ©tĂ© Ă lâautre. VoilĂ pourquoi Alexandre Jollien conclut son dialogue sur une absence de rĂ©ponse Ă la question finale de Socrate, qui voudrait quâAlexandre lui prouve quâil est normal Eloge de la faiblesse, p. 95 â Alexandre, oĂč est prĂ©cisĂ©ment la frontiĂšre entre anormalitĂ© et normalitĂ©? â Je dois tâavouer que je lâignore. â Alexandre, jâai une idĂ©e. AprĂšs cela, nous serons fixĂ©s sur la normalitĂ©. OĂč que je me rende, en quelque situation que je me trouve, tout le monde me considĂšre comme un marginal, un anormal, et me traite comme tel. Pourtant, je marche droit, je respecte les lois⊠Prouve-moi, dĂ©montre-moi que je suis, en tout point, tout Ă fait normal! [Mutisme dâAlexandre] LâincapacitĂ© dâAlexandre Jollien Ă prouver la normalitĂ© de Socrate montre la difficultĂ© voire lâimpossibilitĂ© quâil y a Ă dĂ©finir ce qui est normal ou non. Mais au-delĂ de cette difficultĂ©, câest le danger dâune telle catĂ©gorisation que le philosophe dĂ©nonce. Le regard de lâautre du handicap physique au handicap social Quels sont les effets de la distinction normal/anormal? Pour mieux comprendre le danger dâune telle distinction, il faut comprendre lâinfluence que le regard de lâautre peut avoir sur moi. Pour cela, je vous propose de lire un passage de lâEloge de la faiblesse, dans lequel Alexandre Jollien raconte comment il a appris Ă faire du vĂ©lo. â Un matin, me rendant Ă lâĂ©cole de commerce, plein dâenvie, je regardais les cyclistes me dĂ©passer. Je conçus bientĂŽt un projet. Les potentialitĂ©s immenses quâoffrait un tel engin mâintĂ©ressaient assurĂ©ment. â Ne mâas-tu pas dit que tu tenais Ă peine debout? â Le mĂ©decin me fit Ă©videmment la mĂȘme remarque et dĂ©crĂ©ta le vĂ©lo âimpossibleâ. Jâinformai, malgrĂ© tout, mon pĂšre de mon intention tĂ©mĂ©raire⊠puis aprĂšs dâultimes prĂ©paratifs, je programmai lâexpĂ©dition. Avec force jurons et aprĂšs de longues heures dâentraĂźnement risibles, jâĂ©tais enfin parĂ© pour de nouvelles aventures. Au mĂ©pris du diagnostic mĂ©dical je parvins Ă tenir sur deux roues. ⊠â As-tu constatĂ© que tu devais non seulement braver la difficultĂ©, mais aussi les a priori que nous projetons sur la rĂ©alitĂ©? â DâoĂč mon intĂ©rĂȘt pour la philosophie. Je devais mâarmer pour combattre toutes les Ă©tiquettes que, sans cesse, on nous collait. Eloge de la faiblesse, p. 35-36 Face Ă un problĂšme, en lâoccurrence, apprendre Ă faire du vĂ©lo, Alexandre Jollien rencontre un certain nombre de difficultĂ©s. Cet Ă©pisode montre les deux sources de difficultĂ© auxquelles doit faire face un handicapĂ© au quotidien 1° Les difficultĂ©s viennent tout dâabord de son handicap physique, puisque la coordination des mouvements requise pour faire du vĂ©lo nâest pas parfaitement maĂźtrisĂ©e par Alexandre Jollien. 2° Mais Ă ces difficultĂ©s liĂ©es directement au handicap physique sâajoute une difficultĂ© supplĂ©mentaire. En effet, les a priori du mĂ©decin quâAlexandre doit combattre rendent plus difficile lâapprentissage. Le fait que les autres jugent Alexandre incapable de faire du vĂ©lo rend encore plus difficile lâapprentissage du vĂ©lo par Alexandre. Le regard de lâautre, et ici en lâoccurrence son jugement, ses a priori, ajoute une difficultĂ© supplĂ©mentaire. Au handicap physique sâajoute un handicap social, dont la source est prĂ©cisĂ©ment le regard de lâautre. De la pitiĂ© Ă lâamitiĂ© quelle attitude envers le handicap? Face Ă ces critiques formulĂ©es par Alexandre Jollien, quelle attitude adopter vis-Ă -vis des personnes handicapĂ©es? Si le regard de lâautre est si important et peut engendrer un handicap aussi fort, parfois plus fort que le handicap physique lui-mĂȘme, comment changer notre regard face au handicap? Comment dĂ©passer cette distinction normal/anormal qui engendre le handicap social que lâon vient de dĂ©crire? Le passage suivant, qui compare deux attitudes face au handicap, permet de comprendre la position dâAlexandre Jollien Ă ce sujet Curieusement, mes amis authentiques ne se trouvaient pas parmi les premiers de la classe, ni parmi les dociles, mais bien chez les derniers, les indisciplinĂ©s, ceux qui ricanent âtout derriĂšreâ, ceux qui savent se montrer cruels. Ceux-lĂ mĂȘmes manifestaient Ă mon endroit une tendresse, une innocence, un amour que je nâai jamais trouvĂ©s ailleurs. Leur façon de mâaider, dâentrer en contact avec moi revĂȘtait une forme de nuditĂ©. Ce nâĂ©tait pas la pitiĂ© des petites vieilles qui me donnaient cent sous ce qui du reste ne me dĂ©plaisait pas toujours, ni lâaltruisme ostentatoire du fils Ă papa qui dĂ©montre sa bonne Ă©ducation, son savoir-vivre. LâamitiĂ© du cancre Ă©tait maladroite, discrĂšte, sincĂšre. Il se confiait Ă moi et jâosais me livrer Ă lui. Je me rappelle toujours cet esprit rebelle Ă qui jâadressai ma salutation habituelle âSois sage.â Un jour, il me rĂ©pondit âEt toi, marche droit!â Cela me procura un plaisir extrĂȘme. Il mâestimait pour moi-mĂȘme et nâavait pas pris les pincettes que prennent ceux qui me sourient bĂ©atement quand, Ă la caisse, je paie mon paquet de spaghettis aux herbes. Il y a des sourires qui blessent, des compliments qui tuent. Eloge de la faiblesse, p. 45 La vie dâAlexandre Jollien, en tant quâil est handicapĂ©, et en tant quâil est considĂ©rĂ© par les autres comme une personne anormale », est une succession de combats contre les prĂ©jugĂ©s, contre lâattitude de ceux qui lui imposent cette image dâhandicapĂ© et qui le limitent Ă son statut dâhandicapĂ©. La pitiĂ©, dĂ©noncĂ©e par Alexandre dans cet extrait, est exemplaire de cette attitude celui qui a pitiĂ© de lâhandicapĂ© lâenferme dans son statut dâhandicapĂ©, alors quâune amitiĂ© sincĂšre le considĂ©rera pour lui-mĂȘme, au-delĂ du handicap. La relation entretenue entre Alexandre et ceux qui ont pitiĂ© de lui nâest pas sincĂšre, elle est artificielle, et place toujours Alexandre en position dâinfĂ©rioritĂ©. VoilĂ pourquoi il condamne la pitiĂ©. Au contraire, la relation quâAlexandre entretient avec les cancres est authentique, sincĂšre. Ils restent eux-mĂȘmes et agissent de maniĂšre spontanĂ©e avec Alexandre malgrĂ© son handicap. Ce nâest pas parce quâAlexandre est diffĂ©rent quâils vont agir diffĂ©remment. Et câest ça qui plaĂźt Ă Alexandre. Parce quâils osent rĂ©pondre Ă Alexandre sans prendre des pincettes, parce quâils osent le provoquer, comme ils provoqueraient une autre personne. De la pitiĂ© Ă un comportement authentique, sincĂšre, tel est le changement que doit opĂ©rer le regard de lâautre, sâil veut considĂ©rer lâautre pour lui-mĂȘme, Ă part entiĂšre, et non seulement pour son handicap ou sa diffĂ©rence. Cette critique de la pitiĂ©, et lâimportance de lâinfluence du regard de lâautre sur la personne handicapĂ©e est Ă©galement exprimĂ©e dans le film Intouchables, qui met en scĂšne la rencontre et finalement lâamitiĂ© dâune personne handicapĂ©e et dâun aide soignant qui, au-delĂ du handicap et des prĂ©jugĂ©s, au-delĂ de toute distance thĂ©rapeutique, va considĂ©rer lâautre pour ce quâil est vraiment, câest-Ă -dire une personne Ă part entiĂšre. Dans les deux extraits qui suivent, on voit clairement une diffĂ©rence entre lâattitude des diffĂ©rents candidats au poste dâaide-soignant et lâattitude de Driss, jouĂ© par Omar Sy. Dans ce premier extrait, les rĂ©ponses des candidats ne tiennent pas vraiment compte de lâautre, de ce quâil veut et de ce quâil est. Leurs rĂ©ponses sont toutes faites, trĂšs thĂ©oriques aider lâautre », favoriser lâautonomie des personnes handicapĂ©s ». Lâun dâentre eux va mĂȘme jusquâĂ demander si ce quâil vient de dire est une bonne rĂ©ponse. La pitiĂ© se lit Ă©galement dans les remarques de certains ces personnes qui peuvent rien faire ». Il faut noter quâaucun des premiers candidats ne sâadresse Ă Philippe, et ceux qui osent le regarder le font avec gĂȘne et de maniĂšre trĂšs brĂšve. On remarque Ă©galement lâagacement de Philippe face Ă ces candidats. Par opposition, dans ce deuxiĂšme extrait, lorsque Driss entre, on voit une attitude toute autre. Il agit spontanĂ©ment, il est sincĂšre, authentique. Et surtout, il nâa pas pitiĂ©. Il parle Ă Philippe de maniĂšre directe, de personne Ă personne, sans prendre de gants. Il rappelle ces cancres quâAlexandre Jollien dĂ©crit dans lâEloge de la faiblesse. Câest le premier Ă sâadresser directement Ă Philippe, et non seulement Ă sa secrĂ©taire. Un vĂ©ritable dialogue va sâinstaller, dans lequel Driss nâhĂ©site pas Ă critiquer directement Philippe Si vous connaissez pas, câest que vous y connaissez rien en musique », vous, lĂ , ça mâĂ©tonnerait que vous connaissiez Berlioz », Je vois que lâhumour, câest comme la musique, vous y connaissez rien en fait ». De mĂȘme, face au handicap de Philippe, il ne prend pas de gants ah, câest emmerdant ». Il va mĂȘme jusquâĂ oublier que Philippe ne peut pas se lever dans sa remarque finale vous levez pas ». Alors pourquoi Philippe choisit-il Driss plutĂŽt que les autres candidats? Parce que ce que lâhandicapĂ© recherche, ce nâest pas la pitiĂ©, câest une personne qui sera capable de le comprendre, de le considĂ©rer comme une personne Ă part entiĂšre et non seulement comme une personne handicapĂ©e, et qui va agir avec lui comme avec nâimporte qui dâautre, câest-Ă -dire comme avec une personne normale ». Ce que Driss ne fait pas, câest la distinction normal/anormal qui est Ă la base de la pitiĂ© et du regard de lâautre qui enferme. VoilĂ pourquoi Philippe choisit Driss, choix que la lecture dâAlexandre Jollien nous aide Ă comprendre. LâEloge de la faiblesse, ou comment se nourrir du handicap AprĂšs avoir Ă©tudiĂ© la distinction normal/anormal et proposĂ© un certaine conversion du regard, qui, au-delĂ de la diffĂ©rence, considĂšre lâautre pour lui-mĂȘme et non plus seulement pour sa diffĂ©rence ou son handicap, Alexandre Jollien propose, dans lâĂ©loge de la faiblesse, une certaine maniĂšre de vivre le handicap. Comment se nourrir du handicap, et faire de cette faiblesse physique une force mentale? Tel est lâenjeu de cet Eloge de la faiblesse. Et câest sur ce point que jâaimerais conclure. Car si le regard de lâautre, dont nous avons parlĂ© jusquâĂ maintenant, peut ĂȘtre un poids immense, un vĂ©ritable handicap handicap social, le regard que je pose sur moi-mĂȘme peut ĂȘtre encore plus destructeur, encore plus paralysant. Quelle attitude adopter face Ă la faiblesse ou face Ă la diffĂ©rence? Affronter le regard de lâautre est une chose, mais comment affronter son propre regard? La faiblesse met lâĂȘtre humain en face de nombreuses difficultĂ©s. La vie est une succession de dĂ©fis quâil faut relever. Face Ă la difficultĂ©, deux solutions sâoffrent Ă nous laisser tomber ou faire face Ă la difficultĂ©. Or, pour Alexandre Jollien, faire face Ă la difficultĂ© permet de se dĂ©passer soi-mĂȘme, de dĂ©couvrir des facultĂ©s insoupçonnĂ©es comme de faire du vĂ©lo, bref, de sâĂ©panouir. Câest en ce sens que lâon peut se nourrir de sa faiblesse. Au lieu de se laisser abattre par son handicap et ses difficultĂ©s, on sâen sert pour grandir, pour se dĂ©velopper, jour aprĂšs jour. Enabled, not disabled. Ou comment faire de sa faiblesse physique une force mentale. Cette image montre le changement de perspective que lâon peut rĂ©aliser par rapport au handicap ici, celui qui utilise un fauteuil roulant nâest pas handicapĂ© mais au contraire avantagĂ© par rapport Ă la personne valide qui nâa quâune simple chaise pour sâasseoir. Câest ce changement de perspective que la personne handicapĂ©e doit rĂ©aliser si elle veut se nourrir de sa faiblesse, et non se laisser dĂ©truire par elle. Pour Alexandre Jollien, il y a trois Ă©tapes Ă suivre, trois Ă©tapes sur le chemin de la rĂ©ussite 1° Prendre conscience de sa faiblesse ou de sa diffĂ©rence. ConnaĂźtre sa faiblesse est nĂ©cessaire si lâon veut en tirer profit, si on veut la dĂ©passer. 2° Accepter sa faiblesse ou sa diffĂ©rence. Nier sa faiblesse ou sa diffĂ©rence ne la fera pas sâen aller. Sâaccepter tel que lâon est, dans sa faiblesse ou sa diffĂ©rence, est une Ă©tape nĂ©cessaire pour aller de lâavant. 3° Et demander de lâaide aux autres. Face aux difficultĂ©s, je ne suis pas seul, lâautre peut me venir en aide, si jâose lui demander. Mais pour cela, il faut avoir pris conscience de sa faiblesse et lâavoir accepter, afin dâĂȘtre capable de demander de lâaide Au coeur de ma faiblesse, je peux donc apprĂ©cier le cadeau de la prĂ©sence de lâautre et Ă mon tour, jâessaie avec mes moyens de leur offrir mon humble et fragile prĂ©sence. Lâindividu faible ne reprĂ©sente pas nĂ©cessairement un poids pour lâautre. Chacun dispose librement de sa faiblesse, libre Ă lui dâen user judicieusement. Eloge de la faiblesse, p. 89-90 Pour Alexandre Jollien, la faiblesse a Ă©tĂ© une source dâinspiration comme le montre ses ouvrages, et une immense source dâamitiĂ©, comme il le rappelle Ă chaque page de lâEloge de la faiblesse. LâamitiĂ©, rendue possible par cette ouverture Ă lâautre, est une aide prĂ©cieuse pour la personne handicapĂ©e, une aide sur laquelle Alexandre Jollien ne cesse dâinsister la faiblesse peut devenir fĂ©conde, gĂ©nĂ©ratrice dâamitiĂ© » Eloge de la faiblesse, p. 90. Pour conclure Pour conclure, jâaimerais vous faire Ă©couter une chanson de Grand Corps Malade, un slammeur français qui, aprĂšs un accident de la route, est devenu handicapĂ©. Dans ces textes, il parle du handicap, et de nombreux thĂšmes abordĂ©s dans ce cours sont prĂ©sents plus particuliĂšrement dans ce texte, intitulĂ© sixiĂšme sens ». On y retrouve lâimportance du regard de lâautre, et cet appel Ă la conversion du regard il faut considĂ©rer lâautre pour lui-mĂȘme et non seulement pour son handicap. Au-delĂ de la distinction normal/anormal, il faut changer dâattitude. Enfin, on retrouve cette idĂ©e quâil faut faire de la faiblesse physique une force, et que ce sixiĂšme sens qui apparaĂźt alors, câest la joie de vivre, malgrĂ© le handicap, malgrĂ© la diffĂ©rence. CrĂ©dits Photo by Edward Cisneros on Unsplash; SAF-2006-D179, par Peace Corps, Government Works; Enabled, not disabled, par NaBHaN. Citer ce billet MaĂ«l Goarzin, "Handicap et diffĂ©rence la leçon dâAlexandre Jollien". PubliĂ© sur Comment vivre au quotidien? le 12 mai 2020. ConsultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. Lien aSDmz.